Chaudière à gaz ou au fioul, la hausse du coût de l'énergie impacte fortement les budgets des copropriétés et les provisions et charges supportées par les copropriétaires. Cette situation pourrait d’ailleurs s’aggraver avec le risque de défaillances multiples de copropriétaires déjà en situation difficile. Le bouclier tarifaire étendu aux copropriétés par le décret n°2022-514 du 9 avril 2022 ne semble que retarder les difficultés à venir.

A l’approche de l’hiver, certains syndicats de copropriété et syndics s’interrogent sur la possibilité de ne pas rallumer leur chaudière collective et de palier temporairement avec des dispositifs de chauffage individuels. Mais à quelle majorité l’assemblée générale peut prendre une telle décision ?

Par principe la suppression d’un service collectif ou d’un élément d’équipement commun requière une décision à l’unanimité de tous les copropriétaires réunis en assemblée générale (utopique en pratique).

En effet, l’article 26 de la loi du 10 juillet 1965 dispose notamment que « (…) L'assemblée générale ne peut, à quelque majorité que ce soit, imposer à un copropriétaire une modification à la destination de ses parties privatives ou aux modalités de leur jouissance, telles qu'elles résultent du règlement de copropriété ». Voir notamment en ce sens CA Paris 2 juillet 2009 n°08-08837.

La jurisprudence a eu l’occasion de se prononcer à de multiples reprises et de nuancer ce principe en retenant la seule double majorité de l’article 26 de la loi, singulièrement lorsque la copropriété décide de remplacer (définitivement) un système de chauffage devenu vétuste par une solution individuelle moins onéreuse. La notion juridique d’amélioration prenant alors le dessus.

En ce sens notamment un arrêt de la Cour de cassation du 04 janvier 1989  : « L'arrêt retient que l'installation collective de chauffage, remontant à plus de quatre-vingts ans, était à la fois vétuste, inefficace et insalubre, que sa remise en état ne permettrait pas d'obtenir un résultat conforme aux normes actuelles ; que par ces motifs, desquels il résulte que l'installation d'un chauffage individuel n'affectait pas les modalités de la jouissance des parties privatives mais constituait, comme elle l'a retenu, une amélioration ».

Cet assouplissement ne semble toutefois pas pouvoir s’appliquer à une suppression temporaire d’un service collectif, et particulièrement à la décision de ne pas rallumer une chaudière collective en période de hausse du coût de l’énergie.

Un copropriétaire peut-il pour autant décider seul de se désolidariser du chauffage collectif et utiliser un système individuel pour échapper au règlement de ses charges ?

Sous réserve de certaines contraintes techniques tenant à la dépose d’équipements de l’installation collective (radiateurs par exemple) situés dans le lot, un copropriétaire peut choisir seul d’installer un système individuel. Par exemple des radiateurs électriques ou un système de pompe à chaleur réversible (sous réserve d’obtenir l’autorisation de l’assemblée générale des copropriétaires si cette installation touche aux parties communes ou à l’aspect extérieur de l'immeuble).

Pour autant, la mise en place de ces systèmes individuels ne dispense pas le copropriétaire sécessionniste de participer aux charges collectives de chauffage, en application de l’article 10 de la loi du 10 juillet 1965, sans autorisation d’une assemblée générale modifiant spécifiquement la répartition des charges de chauffage (là encore à l’unanimité des propriétaires en application de l’article 11 de la loi du 10 juillet 1965).

La solution reste encore, aujourd’hui plus que jamais, et quand la technique le permet, la mise en place de systèmes d’individualisation des frais de chauffage selon la consommation réelle.

L’article 24-9 de la loi du 10 juillet 1965 dispose à ce titre « Lorsque l'immeuble est pourvu d'un chauffage commun à tout ou partie des locaux occupés à titre privatif et fournissant à chacun de ces locaux une quantité de chaleur réglable par l'occupant et est soumis à l'obligation d'individualisation des frais de chauffage en application de l'article L. 241-9 du code de l'énergie, le syndic inscrit à l'ordre du jour de l'assemblée générale la question des travaux permettant de munir l'installation de chauffage d'un tel dispositif d'individualisation, ainsi que la présentation des devis élaborés à cet effet ».

Actualités

Transaction : Nullité du mandat pour défaut d’information précontractuelle ?

La cour d’appel de Paris, dans un arrêt du 12 juillet 2024 n°22-10777, juge que l’acquéreur professionnel d’un fonds de commerce ne peut se prévaloir de la nullité du mandat de l’intermédiaire immobilier au motif que les dispositions relatives à l’information précontractuelle n’ont pas été respectées.

En effet la cour d’appel de Paris rappelle que les dispositions sur le document d’information précontractuelle (DIP) figurent dans le code de la consommation, applicables aux seuls consommateurs et non aux professionnels entre eux. En l’occurrence il s’agissait de l’achat d’un fonds de commerce d’agence immobilière et l’acquéreur (professionnel de l’immobilier en l’espèce) tentait d’échapper au paiement des honoraires de son confrère notamment sur ce fondement.

Transaction : Valeur d’une signature scannée sur une promesse ?

La Cour de cassation rappelle dans un arrêt du 13 mars 2024 n°22-16487, par la voix de sa chambre commerciale, qu’une signature scannée apposée sur une promesse peut être valable.

La Haute Cour confirme toutefois l’analyse de la cour d’appel de Versailles qui juge que ce procédé ne peut être assimilé à celui utilisé pour la signature électronique qui bénéficie d'une présomption de fiabilité en application de l'article 1367 alinéa 2 du Code civil.

Dans cette espèce la Cour de cassation ne reconnaît toutefois pas la validité du procédé, car à l’inverse de la signature électronique, il n’est pas démontré le consentement des vendeurs à l’apposition de leurs signatures scannées sur l’acte de cession.

Bail commercial : Charges locatives et stipulations expresses

La Cour de cassation, dans un arrêt du 30 mai 2024 n°22-22981, rappelle désormais que le bailleur ne peut plus imputer ni récupérer sur le preneur à bail commercial les charges qui n’ont pas été expressément prévues dans les stipulations du contrat (et dans l’inventaire prévu par l’article L145-40-2 du code de commerce).

En l’espèce le locataire commercial demandait le remboursement des charges qu’il avait réglées au titre des frais de dératisation, de désinfection, de câblage, de maintien en fonction des ascenseurs et la taxe de voirie qui lui avaient été imputées au titre de sa quote-part de charges de l'immeuble.

La Haute cour fait droit à la demande de la société locataire et censure ainsi la cour d’appel de Versailles qui n’avait pas vérifié que ces charges figuraient expressément comme récupérables au titre du bail conclu.

Transaction : Irrévocabilité du mandat et période de dénonciation

Il résulte de l’article 78 du décret du 20 juillet 1972 que passé un délai de trois mois à compter de sa signature, le mandat contenant une clause d’exclusivité ou une clause pénale peut être dénoncé à tout moment par chacune des parties, à charge pour celle qui entend y mettre fin d’en aviser l’autre partie quinze jours au moins à l’avance par lettre recommandée avec demande d’avis de réception.

La Cour d’appel de Bordeaux dans ce même arrêt du 1er février 2024 n°20-03739 juge qu’en vertu de cette disposition pendant les trois premiers mois irrévocables du mandat, il n’est pas possible de le dénoncer, sauf à notifier le préavis quinze jours en amont afin que le mandat prenne effectivement fin au bout de ce premier délai incompressible de trois mois.

En l’espèce la période irrévocable de 3 mois prenait fin le 8 avril 2019, or les mandants avaient dénoncé le mandat le 4 avril 2019 pour ce terme, sans respecter le délai de 15 jours.

Dans l’intervalle l’agence leur a adressé une offre d’achat aux conditions du mandat le 12 avril 2019, à laquelle ils n’ont pas donné suite. Ils sont légitimement condamnés à payer la clause pénale à l’agence, la cour d’appel confirmant que l’offre d’achat a été transmise pendant la validité du mandat.

Copropriété : Modalités pratiques de l’appel de cotisation du fonds travaux

Comment doit-être appelé le fonds travaux obligatoire, selon les tantièmes généraux ou selon le critère d’utilité ?

La Cour de cassation répond à cette question dans un arrêt 4 juillet 2024 n°22-21758 publié au Bulletin. Pour la Haute Cour, la cotisation au fonds de travaux prévue par l'article 14-2 II de la loi du 10 juillet 1965, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi dite ELAN du 23 novembre 2018, est appelée au même rythme que le budget prévisionnel. Elle précise en outre qu’elle n'est pas répartie à proportion des provisions de ce budget incombant à chaque copropriétaire, mais comme les charges relatives à la conservation, à l'entretien et à l'administration des parties communes.

En effet, selon l'article 10 alinéa 2 de la loi de 1965 dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n°2019-1101 du 30 octobre 2019 « les copropriétaires sont tenus de participer aux charges relatives à la conservation, à l'entretien et à l'administration des parties communes et de verser au fonds de travaux mentionné à l'article 14-2 la cotisation prévue au même article, proportionnellement aux valeurs relatives des parties privatives comprises dans leurs lots, telles que ces valeurs résultent des dispositions de l'article 5 ».

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